Produits laitiers Le pire a été évité, mais l’avenir inquiète
Le rebond des cours du beurre et de la poudre maigre, ainsi que le niveau des ventes en GMS, sauf en AOP, rassurent quelque peu dans un contexte où les ventes RHD ont été très dégradées. Mais l’inquiétude persiste pour les mois à venir.Par Hélène Laurandel
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Si à très court terme, « les signaux sont rassurants sur l’équilibre des marchés », selon l’Institut de l’élevage (Idele) dans son flash info « Tendances lait viande » de juin, et si la catastrophe imaginée au début du confinement a été évitée sur le marché des produits laitiers, l’incertitude reste de mise pour les six mois à venir. « Va-t-on assister à une nouvelle chute des cours plus durable dans un contexte international où une récession économique est annoncée ? », s’interroge Gérard You, chef de service conjoncture laitière à l’Idele, alors que les cotations du beurre et de la poudre maigre rebondissent depuis la troisième semaine d’avril, après avoir dévissé en raison des incertitudes générées par la situation de crise sanitaire et de confinement. Sur cette période, « les utilisateurs, surtout industriels, étaient attentistes faute de visibilité sur l’évolution de la demande et des marchés », indique l’Idele.
Après la chute, le rebond
Le marché du beurre a retrouvé son niveau d’avant confinement, après avoir chuté de 900 €/t en six semaines (voir infographie). Quant à la poudre maigre, elle avait perdu 600 €/t entre le début du confinement et la mi-avril. Ces cours peuvent influencer le prix du lait dans la mesure où celui-ci peut être en partie transformé pour des marchés qui y sont soumis.
De même, après avoir décroché jusqu’à mi-avril, les cours des ingrédients laitiers se redressent. La poudre de lactosérum repart également à la hausse grâce à la reprise de la demande chinoise en alimentation animale. Ce n’est d’ailleurs pas tant la Chine qui pose question pour l’avenir, mais plutôt « les Philippines ou le pourtour méditerranéen avec des problèmes de solvabilité à venir, tout comme pour certains pays producteurs de pétrole avec des cours plus bas », détaille Gérard You, qui estime que « le pire a été évité à court terme ».
Si la première vague de la crise s’est mieux passée que prévu, « nous appréhendons la vague suivante dans un contexte à l’équilibre instable ». Les marchés de produits laitiers ont en effet « finalement bien résisté au chamboule-tout du confinement dans la plupart des pays consommateurs et importateurs de produits laitiers ».
Pics de hausse EN GMS
Ainsi, pour les produits laitiers, selon la société d’études Iri, des semaines 12 à 19 (la période de confinement), la grande distribution a accru ses ventes en moyenne de 31 % en crème, 27 % en beurre, 14 % en laits conditionnés, 13 % en ultra-frais (surtout basiques et MDD) et 22 % en fromages libre-service. Toutefois, ces chiffres sont contrebalancés par la réduction d’activité de 14 % des rayons à la coupe (qui a coûté aux fromages AOP et IGP, tout comme l’arrêt de la RHD) et celle des circuits traditionnels (crémeries, halles, marchés). Les ventes retourneront-elles aux niveaux d’avant Covid-19 ? Avec la reprise progressive de la restauration, ce retour semble se faire pas à pas (infographie), mais sans certitude pour l’avenir. En bio, la consommation est très dynamique (+ 10 % de lait bio en avril). Cependant, il est craint qu’un coup d’arrêt soit donné à la montée en gamme, au bénéfice des produits simples et basiques largement consommés durant le confinement.
Moins de lait produit
Toutefois, le transfert de consommation de la restauration vers le domicile, n’a pas compensé forcément les pertes liées au quasi-arrêt de la RHD, comme le fait remarquer Bertrand Rouault, directeur développement d’Eurial, branche lait du groupe coopératif Agrial (ci-dessous). La Coopération agricole laitière évalue que les pertes peuvent atteindre presque 50 % (ci-contre). En outre, le confinement a freiné certaines exportations UE vers pays tiers, comme en fromages, avec un recul de 5 % sur les quatre premiers mois par rapport à 2019. En revanche, elles ont progressé de 35 % en beurre.
Pour ne pas aggraver une situation s’annonçant tendue, l’interprofession laitière avait mis en place en avril un dispositif de lissage de la production de lait, avec un fonds de solidarité pour aider l’éleveur (320 €/1 000 l) qui limiterait sa production. 22 000 exploitations (40 % des éleveurs français) ont contribué à cette baisse, soit 48 Ml de lait.
Le stockage privé connaît aussi un certain succès dans l’UE. Les demandes d’aide portent sur 42 167 t de fromages, dont 5 770 t françaises.
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